Le coing des mystères !
Il y a une première chose à constater à propos du coing c'est qu'il ne sait pas exactement lui-même, si il est de la famille de la pomme ou de la poire, mais son arrivée sur terre a beaucoup d'avance sur ces deux-là. Il est resté à son état primaire, pas vraiment dénaturé ou civilisé. Par contre, il abandonne son nom hébreu biblique «אספרגל» ou «codoinz» en vieux français, et préfère son nom populaire : coing et chaboush en hébreu חבוש.
Sous une pelure quelque peu poussiéreuse et velue et une apparence musclée, il ne se rend pas facilement aux dents moins perçantes, pour arriver à son goût particulier, mais surtout à ses secrets et vertus cachés. Certains disent qu'il est le fruit de la tentation et de la conquête, racontés dans la Genèse et dans la Mythologie Grecque. Il contribue aussi secrètement à la recherche médicale, notamment aux produits pharmaceutiques. Dans la médecine traditionnelle, on dit qu'il est bon de sucer ses graines pour une meilleure clarté, et manger le fruit serait bon contre l'enrouement de la voix et la purification du sang.
Dans toute sa modestie et sans que nous le sachions, il nous a même apporté le mot «marmelade», originaire du portugais et qui signifie «confiture de coings».
Son apparition sur les marchés pendant Roch Hachana l'a amené sur la table de notre fête pour enrichir les bénédictions. Certains le bénissent et le mangent la deuxième nuit de la fête, comme un nouveau fruit à savourer. Et son secret est le signe qui lui est donné, puisque les tunisiens le bénissent avant qu’il ne le mange par : "יהי רצון... שתתיר ותשחרר חבושים ממאסרם" que vous autorisiez et libériez les "bandagés" (les blessés) de leur emprisonnement" pensée définitivement vêtue de compassion, chacun de nous ayant quelque chose dont il veut se libérer.
Mais il semble que la place d'honneur du coing a été conquise par les juifs tunisiens pour Yom Kippour. Qui ne se souvient des courtes pointes brunes et parfumées de poudre de girofle et décorées de ses griffes, qui sentent fort... Les corps et âmes de ceux qui priaient, torturés par le jeûne et le stress qui nous prennent à Yom Kippour se renforçaient quand les coings bienfaisants étaient transmis de main en main par les fidèles dans la synagogue et que chacun pouvait les renifler longuement et longtemps et s'imbiber de leurs parfums particuliers.
La plupart achetaient leur coing quelques jours avant le jeûne, pour les envelopper dans un chiffon humide avec de la poudre de girofle, jusqu'à ce que la couleur brune recouvre tout ce fruit devenu, depuis ce moment, sacré . Le sentier de ce parfum suivait et planait tout au long des 26 heures de carême jusqu'à ce que Yom Kippour se réalise et finisse complètement au Grand Retour de la Synagogue à la maison pour enfin se jeter sur cette confiture spéciale de coings rougeâtre et chatoyante (Mag'on Sfrj'l) puis les gâteaux beshkoutou et boulou enchaînés du verre sacré d'Orgeat.... Sha.... Sha...
Gmar Hatima Tova
Martine Claux
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