Les multiples conséquences de la situation politique israélienne

Les multiples conséquences de la situation politique israélienne (info # 011606/19) [Analyse]

Par Guy Millière © Metula News Agency

 

Le fait que Binyamin Netanyahou n’ait pu former un gouvernement et qu’il a dû se résoudre à provoquer de nouvelles élections en septembre a de multiples conséquences.

 

Pour la société israélienne au premier chef, bien sûr, puisque celle-ci est condamnée à être dirigée par un gouvernement provisoire qui ne peut que gérer les affaires courantes et se trouve dans l’incapacité de prendre des décisions importantes.

 

Cela a des conséquences pour l’image d’Israël à l’échelle internationale : le pays donnait jusque voici quelques mois une image de stabilité, et Israël avait été classé récemment huitième puissance du monde en termes d’accomplissements et d’influence ; or cette image est écornée et le pays apparaît désormais marqué par l’indécision et par des déchirements qui, vus de l’extérieur, peuvent paraître absurdes.

 

Cela a des conséquences pour la stature de Binyamin Netanyahou, Premier ministre sortant d’Israël. Celui-ci est détesté depuis longtemps par tous ceux qui détestent Israël et qui, tout en le détestant, ne pouvaient pas ne pas noter qu’Israël inspirait le respect.

 

Que Netanyahu n’ait pu former un gouvernement a été décrit par tous ceux qui le détestent comme un échec personnel et, brutalement, les ennuis judiciaires qui pèsent sur sa personne se sont retrouvé étalés dans nombre de journaux et de magazines sur la Planète.

 

Binyamin Netanyahou est un Premier ministre fragilisé, déstabilisé, à un moment où les tensions régionales s’accentuent et où des débats cruciaux pour la région prennent place et impliqueraient qu’Israël ait à sa tête un Premier ministre à même de consacrer toute son attention à ces tensions et ces débats.  

 

Les conséquences touchent aussi le plan de paix de l’administration Trump, et Donald Trump aurait voulu pouvoir s’appuyer sur un gouvernement israélien stable et solide pour avancer. C’est tout le plan de paix qui se trouve du même coup ébranlé, de même que la synergie entre Trump et Netanyahou, en qui Donald Trump voit un partenaire indispensable.

 

Le volet économique du plan de paix sera dévoilé lors de la réunion qui se tiendra à Manama, au Bahreïn, les 25 et 26 juin. La réunion est maintenue, bien que Donald Trump n’ait pas caché son irritation face à ce qu’il a décrit comme le “désordre politique israélien et l’irresponsabilité de quelques politiciens” (il n’est nul besoin d’être grand clerc pour deviner que ce n’est pas Binyamin Netanyahou qu’il visait mais Avigdor Lieberman et ses partisans).

 

Les participants annoncés seront tous là, nul n’ayant jamais pensé que l’Autorité Palestinienne viendrait.

 

Le but sera de poser sur la table des propositions financières à même de dissocier la population placée sous le contrôle du Hamas et de l’Autorité Palestinienne des dirigeants du Hamas et de l’Autorité Palestinienne et de faire comprendre à ces populations qu’un avenir est possible pour elles si elles sortent de l’impasse qui les condamne à la misère et à n’être que des armes de destruction anti-israéliennes et antijuives.

 

Le but sera aussi de dissocier les dirigeants du monde arabe sunnite de ceux du Hamas et de l’Autorité Palestinienne. 

 

Si le premier objectif semble difficile à atteindre en raison de l’intensité de la haine implantée dans la tête des Arabes vivant à Gaza et sur les terres occupées par l’Autorité Palestinienne, et en raison des appareils répressifs dont disposent le Hamas et l’AP, des fissures peuvent néanmoins se faire jour. Des enquêtes montrent en effet qu’une nette proportion des Arabes concernés seraient intéressés par de l’argent et la possibilité éventuelle de partir vivre ailleurs. 

 

Le deuxième objectif est plus facile à atteindre : nombre de dirigeants arabes sunnites considèrent de plus en plus ouvertement la question “palestinienne” comme un fardeau dont ils aimeraient se défaire, le Hamas comme une organisation délétère, et l’Autorité Palestinienne comme une entrave à de meilleures relations avec Israël et les Etats-Unis.

 

Le volet politique du plan de paix dépendra de ce que seront les résultats du premier volet et de l’état d’avancement de l’endiguement du régime des mollahs.

 

L’incertitude politique qui règne en Israël est à même de créer une méfiance chez divers dirigeants du monde arabe sunnite, qui ne s’engageront sans doute pleinement que s’ils perçoivent que l’incertitude peut s’estomper.

 

Le doute est à même d’être utilisée par les amis des organisations “palestiniennes”, qui sont susceptibles de mener diverses actions de déstabilisation. Le régime des mollahs, privé de moyens financiers par l’endiguement, a quasiment coupé les vivres au Hezbollah, mais il peut envisager d’actionner à nouveau le Hamas et le Djihad Islamique à Gaza. Le Hamas peut aussi être actionné par la Turquie : Erdogan est proche des Frères Musulmans dont le Hamas est la création et la branche “palestinienne”.

 

La France, l’Allemagne, et partant les instances dirigeantes de l’Union Européenne soutiennent résolument l’Autorité Palestinienne (et parfois même le Hamas), et peuvent tenter des manœuvres diplomatiques : les chances de succès de ces manœuvres sont minces, mais pas inexistantes.

 

“L’irresponsabilité de quelques politiciens” a eu de quoi irriter Donald Trump. Elle est très lourde de conséquences qui ne sont pas encore toutes visibles.

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