Une guerre médiatique, une indignation sélective
David Bensoussan
L’auteur est professeur de sciences à l’Université du Québec
Les guerres, hélas, ne se déroulent jamais dans un vide moral : elles se jouent aussi sur la scène médiatique et diplomatique. Qui se souvient aujourd’hui de Dresde, 1944 ? En une seule nuit de feu, les aviations alliées ont pulvérisé une ville, causant quelque cent mille morts. Les Alliés n’ont pas hésité : l’ultime objectif — la reddition totale du nazisme — justifiait des moyens d’une brutalité inouïe. C’est un précédent qui oblige à la prudence quand on veut juger des ripostes d’un État attaqué, comme l’Israël d’aujourd’hui.
Récemment, une commission indépendante mandatée de l’ONU a allégué que les actions d’Israël à Gaza constituent un génocide. Ces accusations, si lourdes, exigent des preuves irréfutables pour affirmer l’intention de détruire un peuple. Elles semblent reposer sur des interprétations spéculatives de l’intention, sans tenir compte des opérations militaires visant des combattants ennemis nichés dans un tissu urbain densément peuplé ni des efforts israéliens pour préserver des couloirs humanitaires malgré les risques de détournement.
Israël ne fait pas face à un état régulier dont on pourrait viser des infrastructures militaires, mais à un mouvement terroriste qui s’abrite délibérément parmi des civiles dans les zones densément peuplées. Les terroristes du Hamas ne portent ni uniformes ni badges; ils opèrent sur les toits, tirent sur des villages israéliens, puis disparaissent sous terre, au sein d’un réseau de tunnels interdit d’accès à la population civile qu’ils prétendent défendre. On ne combat pas une armée qui se déclare, mais avec une tactique qui instrumentalise la souffrance pour en faire une arme politique.
Cette réalité factuelle est pourtant trop souvent occultée. Les organisations onusiennes, des écoles, des hôpitaux et même des installations gérées par l’UNRWA ont, selon des preuves accumulées, servi de refuges, de caches et parfois de bases pour des combattants. Quand les institutions internationales se trouvent instrumentalisées, ou quand elles ferment les yeux, la neutralité proclamée cesse d’être crédible. L’ONU est une institution discréditée du fait qu’elle n’a guère brillé par l’universalité de son indignation. Elle ignore les conflits tragiques sur la planète et vote des centaines de résolutions ciblant Israël et ce, bien avant les événements de Gaza. Elle nomme des commissions présumément indépendantes dont les conclusions semblent écrites d’avance. Des accusations de génocide ont été avancées à l'ONU le 10 octobre, bien avant l'intervention israélienne qui eut lieu le 27 octobre. Selon le Washington Free beacon, la commission d'enquête onusienne sur la classification de la sécurité alimentaire a modifié ses critères pour pouvoir déclarer la famine à Gaza...
Cela semble difficile à croire. Il n’y a qu’à chercher combien de fois le rapport de 70 pages de la commission d’enquête de l’ONU daté du 15 septembre 2025 mentionne les victimes du 7 Octobre 2023, ou les 48 otages israéliens innocents qui restent détenus par le Hamas, avec une once d’empathie ou de compassion. Perte de temps, la réponse est zéro!
Nous vivons une guerre médiatique : des images sélectionnées, des titres de journaux qui prétendent capter l'émotion collective (mais tentent en réalité de la façonner), des organisations internationales qui amplifient certaines voix tout en ignorant d’autres tragédies. Le photomontage et la rhétorique deviennent des armes, aussi efficaces que des missiles sur notre conscience.
Dans l'intervalle, les actes de piraterie morale — le détournement des vivres, la rétention d’aide, l’interdiction d’évacuation des civils hors des tunnels — révèlent le cynisme du calcul stratégique de ceux qui prétendent se battre pour un peuple...
Faut‑il en conclure que toute riposte est automatiquement condamnable ? Non. Il n’y a qu’à prendre comme exemple les bombardements occidentaux contre des noyaux djihadistes en Syrie, qui ont aussi provoqué dégâts et morts collatéraux en nombre. Cela fait partie d’une réalité tragique où la force est parfois le seul instrument pour neutraliser une menace horrible et omniprésente. Mais il faut juger les actes à la lumière de leur contexte : C’est évidemment le Hamas, pas les forces de défense israéliennes, qui se cache parmi les civils, qui instrumentalise les hôpitaux ou les écoles et qui détourne l’aide humanitaire pour l’utiliser comme bouclier.
On ne neutralise pas la malveillance par des phrases d’indignation sélective. La justice exige de regarder l’ensemble des faits, de dénoncer les crimes de guerre partout où ils se produisent et de refuser l’instrumentalisation des victimes. Pour qu’un jugement moral conserve sa valeur, il doit être impartial. Or, l’impartialité de trop d’instances internationales est aujourd’hui mise en cause. Et tant que ce déséquilibre persistera, la vérité sera à la merci des narratifs dominants, pendant que la paix est à la merci des manipulateurs de la souffrance.
