Nous sommes à la veille de "Ch-oudat Ytrou" ou en hébreu "Seoudat Ytro" qui sera fêtée selon la tradition juive tunisienne s.D.v. jeudi soir , c.a.d. le jeudi qui précédera le Chabbat de la Paracha de Ytro (le jeudi 1er Fevrier 2018).
Calendrier des fetes Juives de l'annee
C'est une TJTT [tradition juive tunisienne typique] que l'on nomme aussi : La Fête des Garçons
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TABLE DE LA TRADITION DE YITHRO
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Nous sommes à la veille de "Ch-oudat Ytrou" ou en hébreu "Seoudat Ytro" qui sera fêtée selon la tradition juive tunisienne s.D.v. jeudi soir prochain, c.a.d. le jeudi qui précédera le Chabbat de la Paracha de Ytro (le jeudi 1er Fevrier 2018).
C'est une TJTT [tradition juive tunisienne typique] que l'on nomme aussi : La Fête des Garçons
C'est la deuxième TJTT de la période hivernale, entre les fêtes de Tichri et Pessah', dans ce que j'appelle : "La trilogie juive tunisienne de l'hiver" qui compte : 1. La fête des filles [Roch H'odech El-Bnat], 2. La fête des garçons [Ch-oudat Ytrou] et enfin, 3. La Bsissa [ou Bchicha] de Roch H'odech Nissan [Leilat Nichene]. Il y en a pour tous, la première est pour les filles, la seconde est pour les garçons et la dernière est pour tout le monde.
Cependant, pour le juif d'origine tunisienne, Seoudat Ytro c'est avant tout et surtout une table très bien garnie et un très bon repas aux mets typiquement tunisiens.
Voici une brève présentation de Seoudat Ytro sous forme de questions posées par un petit garçon, avec les réponses.
- Comment appelle-t-on cette fête ?
Séoudat Ytro ou la fête des garçons
- Qu'est-ce que c'est ?
C'est une Séouda [repas en hébreu] que l'on fait à la maison.
- Quand la fait-on ?
Le jeudi soir de la semaine de la paracha de Ytro (entre le 15 et le 24 Shvat)
- Qui fête cela ?
Tous les juifs de Tunisie, les grands et surtout les petits, religieux et non religieux.
Chaque famille fait une Séouda dans son foyer et invite souvent ses proches.
Depuis quelques années, des Associations organisent en Israël des fêtes de Seoudat Ytro communautaires dans des endroits publics avec des mets tunisiens, un accompagnement musical de chansons et de Piyoutim et parfois avec un cours de thora ou une bénédiction de rabbin.
- Comment fête-t-on cela ?
C'est un festin dans lequel sont servis de nombreux condiments de toutes sortes dans des ustensiles et des couverts tous petits, comme pour une dinette d'enfants. On y dit des bénédictions de la thora et on y chante des chansons et des Piyoutim.
- Depuis quand cette tradition existe-t-elle ?
Jusqu'à ce jour il n'y a pas d'information précise pour répondre à cette question. Cependant, d'après différents témoignages, cette coutume existe depuis des dizaines voire même des centaines d'années, mais au moins depuis le début du 20ème siècle (voire citation du chercheur voyageur Nahum Slouchts de 1906).
- Que se passe-t-il de nos jours ?
De nos jours, la tradition est fêtée en Israël et en France par des juifs originaires de Tunisie. Avec le temps, la coutume a subit de légères modifications, cependant l'essentiel est resté sans changement, c.a.d. une Séouda qui est une fête pour les enfants.
- Pourquoi fait-on cette Séouda ?
C'est la question essentielle à laquelle nous pouvons proposer trois réponses possibles dont voici le détail. Cependant, nous pouvons affirmer que l'on trouve la réponse dans des sources écrites et dans des témoignages personnels oraux.
1ère supposition
Dans une époque que nous ne connaissons pas, une épidémie décima la communauté et les enfants [garçons] en étaient les principales et les plus nombreuses victimes. Aussi, on raconte que cette plaie s'est arrêtée brusquement le jeudi de la paracha de Ytro, d'où cette "fête de Ytro" qui est célébrée le jeudi soir [yom h'amichi - le cinquième jour] qui précède la lecture de la paracha de Ytro (Chabbat Ytro) dans la Torah.
Dans la religion juive, des miracles qui sauvèrent des juifs sont fêtés par des repas ou des festins, comme Pessah ou Pourim. Certaines communautés qui ont connu des plaies ou autres catastrophes, ont créé de nouvelles fêtes à l'occasion de sauvetages miraculeux et les ont parfois aussi appelées Pourim, comme le "Pourim de Saragosse". Aussi, comme dans le cas de Pourim, pendant lequel nous avons le devoir de faire un "Grand Repas" [Michté], à l'occasion de ce miracle de la semaine de la paracha de Ytro, nous avons ce repas de Séoudat Ytro qui est riche en couleurs, en saveurs et en diverses valeurs.
2nde supposition
Cette fête se nomme et est célébrée par un repas, en souvenir du repas offert par Ytro à Moché, à Aaron et aux sages [les anciens] (Exode [Chemot] 18, 12) :
" … Ytro, le beau-père de Moché, prit des sacrifices pour Dieu, et Aaron vint et tous les anciens d'Israël, manger le pain avec le beau-père de Moché devant D.ieu … ".
Tous les paramètres sont donc réunis pour expliquer cette coutume et sa forme.
3ème supposition
C'est une festivité en l'honneur des enfants, pendant laquelle on les faisait réciter [souvent pour la 1ère fois] les 10 Commandements de cette paracha qu'ils ont apprise au Keutèb [le Talmud Torah]. Ensuite on leur faisait une fête et pour conclure, à la fin du repas, ils disaient les bénédictions inscrites sur la "Feuille de Ytro" (Ouarkate Ytro) dans laquelle se trouvent aussi les 10 Commandements.
Les enfants étant à l'honneur, le rite se caractérise par une sorte de repas de la taille des enfants avec des petits plats et des petits objets comme dans les jeux d'enfants, avec comme il se doit, à la fin du repas chez les juifs d'origine tunisienne, des petits gâteaux tunisiens : Yoyo, Makroud, brik au miel et Debla ou Manicotti que l'on déguste en lisant la Feuille de Ytro [Ouarkate Ytro].
Par Ailleurs, cette Séouda est célébrée le jeudi car c'est un jour de lecture de la Torah, avec cette semaine là les 10 Commandements, mais aussi, fort probablement, parce que "Jeudi" se nomme "le cinquième jour" [Yom 'Hamichi en hébreu et N-har El-Khmiss en arabe] et nous le savons, le rappel du chiffre Cinq est "bon" contre le "Mauvais Œil", pour protéger et sauvegarder la santé du petit garçon qui se porte mieux et a été épargné des méfaits de cette épidémie ... .
Il faut aussi signaler que :
1. il y a eu des rabbins qui s'opposaient à cette fête qui n'a pas de sources dans la Torah.
2. Les juifs de quelques villes d'Algérie comme Tlemcen, la célèbrent aussi avec un grand couscous au poulet et la nomment "H'ag Sion" qui est en fait une malformation de "H'ag sioum" [H'ag = Fête], du nom des initiales des mots Séoudate Yitro OU Moché [littéralement : Le Repas de Ytro et Moché].
3. A Djerba, cette fête s'appelle aussi "H'inoukh La-Na'ar" ou "Education du Jeune Enfant" et célèbre particulièrement la lecture des 10 Commandements par les jeunes enfants. Ainsi, pour les encourager, on leur prépare un petit festin pendant lequel sont dites des prières et des chants liturgiques.
Cette Seoudat Ytro continue a être célébrée en France et en Israël. Il est intéressant de signaler que la tradition originelle d'un repas festif familial a été conservée surtout en France alors qu'en Israël les originaires de Tunisie célèbrent souvent cette tradition par des soirées communautaires organisées par des associations locales et parfois en famille.
Il est très important de sauvegarder cette tradition car nous aimons tous nous souvenir de ces moments joyeux de notre enfance et il n'y a aucune raison d'en priver nos enfants qui, nous l'espérons, passeront eux-mêmes le flambeau aux générations à venir.
Cette tradition se caractérise par ses couleurs, ses saveurs, ses dimensions particulières, son symbole de la réunion familiale, de son enseignement à l'hospitalité, par cette joie des enfants d'avoir une fête de plus entre Hanouka et Pourim, par sa valeur éducative de la sauvegarde d'une tradition ancestrale et surtout par la lecture des 10 Commandements, qui sont la base de notre sainte Torah, en cette semaine de la paracha de Ytro.
Kmara A'm Akhor … A l'année prochaine, si D… veut.
Texte de Victor Hayoun