L ANCIEN CIMETIERE ISRAELITE DE TUNIS : LE PROBLEME DE LA « HERNIE » ET SON EXPROPRIATION

L ANCIEN CIMETIERE ISRAELITE DE TUNIS :
LE PROBLEME DE LA « HERNIE » ET SON EXPROPRIATION
(Rectificatif au sujet de l’expropriation)

L’ancien cimetière israélite de Tunis était situé en plein centre ville (avenue de Londres) et cette particularité ne manqua pas de provoquer des problèmes au cours du temps .
En mars 1887 , sous le Protectorat français , des émeutes juives éclatèrent dans ce cimetière suite à un décret municipal concédant à une entreprise française le droit exclusif de transport des corps pour y être inhumés . Cette agitation spontanée exprimait le fort attachement de la communauté à ses traditions séculaires et au respect dû à ses défunts .
Dans les années qui suivirent ces graves événements , la situation territoriale du cimetière se compliqua : sous la poussée de l’expansion urbaine , sa position en centre ville apparut comme un spectaculaire « hiatus », une gêne géographique de plus en plus évidente ; le gouvernement du Protectorat proposa , sans succès , aux autorités de la Communauté israélite de désaffecter ce cimetière .
En fait , on projetait notamment d’élargir l’avenue Roustan qui longeait le mur du cimetière mais un saillant de celui – ci (surnommée « hernie ») rétrécissait à ce niveau la largeur d’ensemble de cette voie de circulation .
Les autorités communautaires et rabbiniques furent saisies de la question : pouvait – on ouvrir les tombes et exhumer les corps des défunts enterrés dans cette « hernie » ?
Leurs réponses furent plutôt nuancées à deux reprises, tant en 1930 et 1937 : la loi rabbinique interdisait formellement l’ouverture des tombes et l’exhumation des corps sauf pour leur transfert en Terre sainte ou dans le cas où elles formeraient un obstacle au public ; cependant , on insistait sur le fait que des troubles étaient à redouter car la population israélite croyait aux principes sacro – saints du respect dû au repos séculaire des trépassés .
Les années passèrent sans qu’une solution ne fut trouvée et appliquée ; en fait, lors du déclenchement de la deuxième guerre mondiale et de l’occupation allemande en novembre 1942 , l’autorité militaire française en Tunisie annonça la suppression de la « hernie » pour des nécessités de défense passive et des impératifs de sécurité : l’avenue Roustan fut donc élargie au niveau du mur du cimetière et certaines tombes subirent l’exhumation . Pour le journal conservateur israélite , « L’Egalité », « la farce est jouée » , faisant allusion aux « mille artifices passés » précédemment essayés .
De plus , la municipalité de Tunis fit pression pour légaliser la propriété du cimetière en tant que bien communal , mais cette affaire n’eut pas de suite jusqu’à l’indépendance du pays et la fin du Protectorat .
Le 25 février 1958 , un décret faisait état d’une demande d’immatriculation du cimetière israélite considéré comme bien communal et non comme bien privé . 
La Communauté réagit et une première entrevue eut lieu entre le maire de Tunis Ali Belhaouane et Charles Haddad , président de la Communauté juive . Ali Belhaouane se déclarait favorable au compromis suivant : face selon lui à l’inéluctabilité de la désaffectation du cimetière ,les autorités municipales admettaient , après exhumation des 60 000 corps que ceux – ci soient transférés en Terre sainte ; de plus , diverses compensations matérielles furent promises aux Israélites .
Ali Belahouane devait malheureusement décéder subitement peu de temps après ; son successeur Ahmed Zaouche adopta une attitude plus radicale : il exigea de la Communauté d’avoir à libérer rapidement les lieux et ne tint aucun compte de la promesse de transfert en Terre sainte des corps après exhumation ; d’ailleurs seuls quelques dizaines d’entre eux furent déterrés et le cimetière juif fut définitivement exproprié : l’affaire était close .
En conclusion , le terrain du cimetière juif de l’avenue de Londres attisa de façon de plus en plus pressante les spéculations des diverses autorités en Tunisie : sous le Protectorat , on s’efforça , sans succès , d’imposer la désaffectation de cette nécropole : la « hernie » du cimetière avait été supprimée pour des raisons ou des prétextes de sécurité , mais la volonté de récupérer l’ensemble du terrain s’affirma irrémédiablement sur décision de la municipalité de Tunis , sans permettre le transfert des corps en Terre sainte, dans une Tunisie désormais souveraine et liée par sa solidarité avec le monde arabe .

Albert MAAREK et Claude SITBON

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